MICKAËL POIXBLANC: FOU DE LA DIAGONALE
Diagonale des Fous, Trace des Ducs de Savoie, Templiers, des distances proches souvent des 160 kilomètres et des dénivelés atteignant les 9000 mètres. Derrière ces chiffes, ces performances de trails, se cachent des existences, des vies, des exigences. Celles de Mickaël Poixblanc méritent d’être mieux connues. Rencontre avec un homme « expérimenté ».
Décidément pour rencontrer Mickael il faut choisir sa météo. On s’était quittés le dimanche soir après une journée passée sous la tempête, le froid et la pluie et consacrée au duathlon des jeunes, organisé par le club à Arques la Bataille. On se retrouve le mardi suivant sous les rafales pluvieuses d’un vent de sud qui font trembler les arbres. A chaque fois, il faut le découvrir, dissimulé derrière un uniforme de pluie comme le symbole d’un homme qui me paraissait discret et taiseux. Impression fausse et injustifiée car Mickaël Poixblanc a la parole aisée et parle avec bonheur de sa vie, de sa passion. On m’avait dit (je tairai le nom du « on »): pour le faire venir offres lui une bière. Il n’en fut nul besoin pour qu’il me raconte d’entrée son goût pour le foot qui occupa sportivement trente ans de sa vie avant que fatigué, usé de ce qu’il nomme la « mentalité » il décide d’aller voir ailleurs. Marre des remarques des spectateurs, marre du non respect de l’arbitre, marre d’un sport qui n’était plus le sien. On l’imagine pourtant, en équipe première dès l’âge de 17 ans, courir et courir encore, milieu défensif, milieu offensif, milieu du milieu, comme un N’Golo Kante Tourvillais. Milieu aussi en âge, trop vieux pour les nouveaux venus, trop jeune pour les anciens.
LA DIAGONALE DES FOUS: UN REVE INACHEVE
On se prépare à dérouler chronologiquement la suite quand surgit rapidement au détour d’un mot « blessure » ou « âge » la Diagonale des Fous, cette course mythique de 160 kilomètres et 9 400 mètres de dénivelé qui se déroule en octobre chaque année sur l’île de la Réunion et que Mickaël parcourut en 2019. Il vous raconte et il est encore dedans, souvenir indélébile d’une souffrance toujours présente mais aussi visiblement de moments de vie inoubliables. De suite il vous montre une photo de lui: méconnaissable avec 10 kilos perdus depuis le départ, une photo qu’il ne veut pas publier par pudeur: « je suis trop moche ». Dans les 700 premiers à 20 kilomètres de l’arrivée, il s’effondre, se couche, vomit, marche, s’allonge de nouveau pour franchir finalement l’arrivée. et pense qu’un médecin sur le parcours le découvrant, l’aurait arrêté: « Quand j’entends des athlètes faire 10 kilomètres et déclarer qu’ils sont allés au bout de leur vie, cela me fait sourire ». Alors comment qualifiée cette expérience? « Bonne car j’ai réussi » mais il cherche alors ses mots, hésite et conclue: « cela me laisse un goût …d’inachevé ». Inachevé le mot fort est prononcé et s’ancre dans un coin de la tête. Fou pour autant? Pas du tout car l’image d’un bagne athlétique ne lui convient pas et vite l’oeil devient pétillant, comme pour contrebalancer ses premiers propos: « Et la montagne quelle beauté! Le cirque de Mafate, je n’ai rien vu d’aussi beau ». Deuxième mot magique: la montagne. Comme Céline Petit, il ne veut pas expliquer les raisons de ce bien être quand l’horizon linéaire disparait derrière les crêtes, lorsque vous vous rapprochez du ciel en grimpant, grimpant encore et encore. « Grimper toujours plus, de plus en plus longtemps, c’est mon plaisir et mon objectif. Je me sens heureux désormais à partir de 50 kilomètres. En dessous cela ne m’intéresse plus trop si ce n’est pour m’amuser avec les copains ». Cette fois-ci les mots viennent spontanément. « Sur 70, 100 kilomètres je me sens bien ». Un moment de réflexion et le mot juste est prononcé: « je me sens serein » .
L’EXPERIENCE GAGE DE SERENITE
Cette sérénité, Mickaël l’a acquise, cultivée, au long d’une patiente progression acquise par trois entraînements hebdomadaires en période hivernale et poussée à six entrainements en période intense de préparation. Sérénité est donc le mot adéquat quand il explique comment cette expérience acquise, (insuffisante dit il probablement pour la Diagonale, course si spécifique notamment au niveau du climat), lui permet désormais d’avoir ce « rythme de croisière » dont on sent dans le regard qu’il est la base désormais du bonheur de courir. Rarement blessé, si ce n’est aux mollets, « mais j’arrive presque désormais à gérer ces douleurs, à les prévenir, à modifier ma foulée pour les réduire ». Cet apprentissage, avec lui même comme seul entraineur, est essentiel et on ressent une fierté légitime. C’est lui qui permet de ne pas se donner des objectifs trop élevés, sources de désenchantement. C’est lui encore qui permet de prendre du plaisir et de ne pas trouver les mots pour le définir. C’est encore et toujours lui, qui apporte dans le regard cette joie que tous les sportifs connaissent, celle d’être vivant et de maitriser ce corps, difficile à dompter mais alors source de plénitude.
La solitude participe à ce bonheur. Elle n’est pas recherchée, « mes potes ont beaucoup d’importance et j’aime courir avec eux », mais quand elle est présente elle ne gêne pas Mickaël qui prend même de plus en plus de bonheur à courir en montagne la nuit, éclairé par sa seule frontale, l’esprit concentré sur la course: « Je ne peux pas dire que je pense à ma famille par exemple. Je suis concentré sur mon effort. Je gère ma technique, mon alimentation, ma récupération ». Expérience encore et toujours qui lui fait dire qu’il connait les moments de « moins bien » qui vont venir mais qu’il sait aussi qu’ils vont être passagers et qu’après viendront les « coups de mieux ».
Le résultat dans tout cela? « J’ai l’instinct de compétiteur j’essaie de faire pour le mieux. C’est un moteur essentiel mais je ne veux pas me fixer des objectifs trop élevés qui ne conduisent qu’à des déceptions. Je préfère la bonne surprise. Sur des épreuves de 150 kilomètres se donner un horaire est presque présomptueux. Il peut arriver tellement de choses. ». Et Mickaël de donner en exemple un traileur américain, membre de l’élite, arrêté au bout de 50 kilomètres, enveloppé d’une couverture de survie. On ne frime pas chez les traileurs de très longue distance, la modestie va de pair. Il a fallu du temps pour atteindre ce niveau et on sait que rien n’est acquis, modestie qui permet d’affirmer fortement, avec une fierté non dissimulée: « Je n’ai jamais abandonné! ».
FAMILLE ET COPAINS
Ce chemin parcouru c’est aussi celui de la vie qui l’a amené à courir avec le groupe informel « Jean Paul Villain », composé de son fils, d‘amis: challenges de la Varenne, dix kilomètres (« je suis passé de 38 minutes à 35 minutes en grignotant seconde par seconde » ), il apprend et s’entraine deux fois par semaine encore aujourd’hui avec eux. « Il fallait que je fasse quelque chose ». Mais sur de courtes distances on plafonne rapidement et ce « quelque chose » va se transformer en « autre chose ». C’est le premier fiston Etienne, qui adhérent Poussins aux Piranhas, va amener Mickaël au club. Etienne côtoie Lou Guého et d’autres jeunes Piranhas. Les parents font connaissance, se lient d’amitié, et décident avec Fredo Bourgois, Pascal Hennetier de participer par jeu à des triathlons Découverte à Beauvais, Deauvile. Un éclat de rire montre que l’apprentissage de la natation semble rester dans les mémoires. La section Trail se crée et l’aventure commence. Licence FFA aux Piranhas avec David Cribelier, premiers cross et depuis Mickaël y est resté comme athlète mais aussi comme un bénévole très actif répondant présent à chaque nécessité. Visiblement il s’y sent bien et maintenant c’est Gabin, le deuxième fils qui a sa licence.
La famille est importante et si Mickaël peut vivre pleinement sa passion il sait qu’il doit beaucoup à Carole son épouse qui l’encourage et, on le comprend rapidement, est fier de lui. Pudique et modeste on devine dans ses yeux son bonheur familial quand il glisse combien il est heureux que Carole ait réussi le parcours de 27 kms aux Templiers et qu’elle souhaite faire le 35 km au Trail d’Ecouves en 2022 (NDLR; qui ne sera probablement pas la randonnée trail du club en raison d’un changement de date). La famille, mais aussi les copains sont des enjeux finalement plus importants que le résultat. Les Stéphane, (« j’ai un parcours très proche de Stéphane Vue ») David et tant d’autres, ceux avec qui on se rend à Serre-Ponçon pour courir entre soi malgré l’annulation de la compétition en raison de la Covid. Pas de dossard, pas de chrono mais courir, monter avec les potes, cela vaut toutes les performances du monde. Et on n’hésite pas à faire la fête, partie intégrante de la vie: « je ne fais jamais de régime et fais juste attention dans les deux dernières semaines avant l’épreuve ».
RENDEZ VOUS EN 2022
Cette envie de vivre Mickaël l’exprime en reprenant à son compte la formule « tout ce qui est pris n’est plus à prendre » et en la complétant du souhait de « profiter de mes capacités tout en restant raisonnable ». Alors pour ne pas évoquer l’âge qui vient, « je ne veux pas y penser », on se projette vers le nouveau challenge, un nouveau défi, « sûrement pas un marathon , les courses sur route cela ne m’intéresse pas et sur route je me blesse toujours », mais une route longue, longue qui monte, monte. On a une petite idée qui est restée tout au long de l’entretien comme une lumière allumée. La veille de notre rencontre Mickaël a regardé sur You Tube des vidéos de participants à la … Diagonale des Fous. Il en frémit presque encore. Il s’imprègne des lieux de passage, des paysages. Un rêve inachevé vous dit on. L’inachevé n’attend qu’une chose: sa conclusion. Alors en 2022 Mickaël on sera tous derrière toi avec le sentiment de mieux comprendre ce que tu cherches. Nous te suivrons sur l’Ilet des Orangers, l’Ilet des Lataniers, la passerelle d’Oussy, ou encore le chemin Ratinaud. Et tu nous enverras une photo de toi à l’arrivée. On pourra la publier cette fois.
Eric Rubert.
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